Alpha Blondy : « la lecture est la suite de la parole divine »
La 10e édition de la Rentrée littéraire du Mali battra son plein du 17 au 24 février à Bamako, Djenné et Tombouctou. Parmi les invités de marque, Alpha Blondy, la star africaine du reggae. Il a animé le 19 février une conférence de presse à l’hôtel de l’Amitié sur son émission dénommée ‘’radio livre’’. De sa voix, l’artiste a magnifié le livre et la lecture et lance une énième invitation pour une Afrique au rendez-vous.
Un artiste à voix perçante. Ses chansons ont atteint un très large public à travers le monde. Alpha Blondy est un passionné de la littérature. Invité d’honneur de la 10e édition de la rentrée littéraire du Mali, la vedette de scène a partagé avec la presse le lundi 19 février son amour des belles lettres. Animateur d’une émission dénommée ‘’Radio livre’’ réalisée par radio Alpha Blondy FM à Abidjan, l’hôte du jour, a témoigné des bienfaits qu’apporte la lecture dans la vision du monde. Débuté en 2015, une année après la création de la Radio, l’émission a eu un écho retentissant au près des auditeurs. Le promoteur explique l’idée qui donna naissance à l’émission. « Lorsque nous avons créé la radio, chacun avait des ambitions, d’abord on ne voulait pas d’une radio strictement musicale. Je me suis rappelé que j’aimais bien offrir des livres à mes enfants, qui les lisaient et me font ensuite le compte rendu. J’ai dit au directeur de la radio, que je veux lire des livres», se remémore l’animateur de l’émission. L’étincelle est partie de là. D’une durée de 2 heures, Alpha Blondy, de sa voix porteuse s’enrichit et enrichit ses auditeurs. «D’une pierre je faisais deux coups. Moi-même je découvrais des livres et en même temps je les fais découvrir à mes auditeurs. Par ce que j’ai lis quelque part que si tu veux cacher un secret à un noir, un africain, met le dans un livre », justifie-t-il. Selon lui, les africains ne lisent que pour avoir la moyenne à l’école alors que la tâche est bien plus grande.
Un bond de plus
RFI séduit, a réalisé un reportage sur son émission, véritable accélérateur pour ce nouveau programme. Dans ce reportage Alpha Blondy a surtout aimé l’expression ‘’ sur Alpha Blondy FM on lit avec les oreilles’’. Un tremplin à l’émission qui touchait déjà des auditeurs d’horizons divers. « Tu peux ne pas avoir lu Hampaté Bah ou une ‘’Si longue lettre’’ de Mariama Ba mais quand tu écoutes, c’est comme si on te lisait », soutient l’animateur. Une inspiration issue de la civilisation africaine de l’oralité où la transmission des connaissances se faisait de bouche à l’oreille. « Un jour j’ai décidé de lire des livres. Il y avait beaucoup d’histoire de terrorisme, les pasteurs parlent de délivrance à l’église. Chacun interprétait les écrits selon sa compréhension », explique ainsi Alpha Blondy, le début de son entreprise. « Je lisais le Coran pendant le mois de Ramadan et la Bible pendant les Pâques», explique l’animateur. Par ces lectures, l’artiste confie qu’« on découvre des choses qu’on a pas apprises à l’école, et que la lecture enrichit l’horizon de vision, produit de l’humilité et définie le lecteur », se passionne-t-il. Selon lui « dans chaque livre tu découvres un univers ». Comme un prophète, l’artiste prêche et avance un rapprochement entre les écrivains et Dieu. « Dieu passe par les écrivains pour véhiculer sa parole », croit-il fermement. Résolu dans sa foi, Alpha Blondy a affirmé que « la lecture est la suite de la parole divine et que Dieu se met en scène à travers les êtres », écartant d’un revers de la main le hasard dans l’ordre des choses.
Cri de cœur
Un homme de sa trempe, qui dit tout haut ce qui se murmure tout bas n’a pas passé sous silence la question de l’immigration. Il regrette que la jeunesse préfère aller ailleurs par manque de perspectives. Se mettant tantôt debout tantôt assis, Alpha Blondy s’étonne qu’après plus de 50 ans d’indépendance le continent trébuche encore. « Il nous faut une révolution technique, technologique », se convainc-t-il, saluant les cerveaux » scientifiques du continent, comme Cheick Modibo Diarra. Au bord de la révolte, celui qu’on considère comme un « prophète » se calme et invite la nouvelle génération à changer la manière de penser. « On a appris à l’homme africain à se détester et à détester chez lui, ce qui a créé le syndrome de Stockholm», rejette-t-il, jugeant le mal de l’Afrique très profond.
Sans pessimisme, Alpha Blondy croit en la jeunesse africaine et la convie à croire en elle-même. « Nous sommes condamnés à réussir, obligés d’être solidaire », faisant référence aux douleurs de l’histoire commune, source « d’énergie qui rapproche les uns des autres».
Acherif Ag Ismaguel
Journal du Mali